Les agriculteurs, grands exclus du projet de modernisation du régime de santé et de sécurité du travail.

Montréal, le 27 octobre 2020

Nous saluons la volonté du ministre Boulet, qui en cette période de précarité professionnelle pour beaucoup d’entre nous, propose de moderniser le régime de santé et de sécurité du travail en matière de prévention et de réparation des lésions professionnelles. Ce plan présente cependant des lacunes significatives quant aux enjeux sanitaires posés par l’utilisation des pesticides en milieu agricole et devant lesquels les agricultrices et agriculteurs se retrouvent trop souvent seuls. Victimes des pesticides du Québec (VPQ) et Parkinson Québec sont vivement touchées par le manque de considération pour les agriculteurs dans cette proposition de projet de loi. En effet, en juin 2019, le ministre Boulet déclarait sa ferme intention de mettre à jour la liste des maladies professionnelles liées aux pesticides et de répondre ainsi aux besoins des agriculteurs.

Pourtant, « plus d’un an et demi plus tard, ce projet de loi ne touche pas les producteurs agricoles, n’aborde pas la toxicité des pesticides et propose un processus administratif de révision de la liste des maladies professionnelles, alors qu’il a le pouvoir de la modifier lui-même, comme il l’a fait pour des pathologies fréquentes chez les pompiers » explique Serge Giard, président de VPQ.

Il est nécessaire de rappeler les consensus scientifiques entre l’exposition aux pesticides et le déclenchement de plusieurs maladies graves telles que les lymphomes non hodgkiniens, les myélomes et la maladie de Parkinson. À ce titre, il est choquant d’entendre le ministre Boulet dire que « la littérature scientifique et médicale n’est pas unanime quant au lien existant entre l’exposition professionnelle aux pesticides et le développement de la maladie de Parkinson ». Cependant, 8 méta-analyses conduites dans les 10 dernières années concluent sans équivoque que le risque de développer cette pathologie est multiplié par 1.67 dans le cadre d’une exposition professionnelle aux pesticides. « Le Québec pourrait s’inspirer de la France et de la Suède qui se sont positionnées comme des leaders de la protection de leurs agriculteurs en reconnaissant la maladie de Parkinson comme maladie professionnelle, en 2012 et 2017 » indique Romain Rigal, Directeur des programmes et services de Parkinson Québec. De plus, l’instauration d’un comité scientifique ayant pour mandat de faire des recommandations en matière de maladies professionnelles au ministre ou à la CNESST est salutaire, si et seulement si, celui-ci est indépendant, utilise l’exhaustivité des preuves scientifiques indépendantes de l’industrie des pesticides, et que ses recommandations ne sont pas renversées par les comités administratifs déjà en place. Nous demandons donc au ministre Boulet de proposer immédiatement un règlement à la liste des maladies professionnelles pour y inclure la maladie de Parkinson, le myélome et le lymphome non hodgkinien, développés suite à une exposition professionnelle aux pesticides.

D’autre part, le ministre se réjouit de la couverture prochaine de plus de 94 % des travailleurs québécois. Pourtant, près des trois quarts des 40 000 agriculteurs québécois sont des travailleurs autonomes qui ne bénéficient pas d’un régime obligatoire de couverture. Nous demandons également au ministre de bonifier son amendement à la Loi sur les normes du travail afin d’inclure les producteurs agricoles aux mécanismes de participation aux régimes de couverture.

Finalement, le Québec a une dette envers les agricultrices et agriculteurs qui, au détriment de leur santé, ont contribué à nourrir notre peuple et notre économie. Nous demandons au ministre de mettre en place un dispositif d’indemnisation fondé sur la nécessité de compensation du préjudice, mais également sur la responsabilité de l’État québécois qui a trop souvent permis l’utilisation de substances nocives.

Victimes des pesticides du Québec et Parkinson Québec s’engagent à continuer de travailler avec le gouvernement du Québec pour régler cette importante question de santé publique et de justice sociale.